Il fut coulé le 1er juin 1794 lors d'un combat avec une escadre
anglaise au large de Brest, alors qu'il escortait un convoi de navires
chargés de blé en provenance d'Amérique.
Les premiers rapports expédiés aux députés
de la Convention font état de la perte d'un navire, le Vengeur,
qui aurait coulé avec tout son équipage criant à pleine
gorge : «Vive la Patrie, vive la République». Les Conventionnels
s'enflamment. Le poète André Chénier écrit
des vers dithyrambiques :
«Lève-toi, sors des mers profondes,
Cadavre fumant du Vengeur
Toi qui vis le Français vainqueur
Des Anglais, des feux et des ondes...,»
La réalité est moins héroïque. Le navire
en train de couler a été évacué, et, une partie
de l'équipage a été secourue par l'ennemi. Près
de 400 marins et officiers seront libérés quelques mois plus
tard. Cela ne changera rien à la légende.
Ecoutez la musique :
Que vous avez donné de gloire À la Patrie
Tourville, ami Jean Bart Et toi, vaillant Suffren
Sur les vagues en furie, Au milieu de la tuerie
Vous étiez toujours en train Comme il sied au marin.
Enfants, sur le Vengeur, Je vois aussi des braves
Ils sont un contre dix, Luttant d'un ferme coeur.
Pour ne point subir d'entraves,
Ils combattent, fiers et graves,
Mitraillés par le vainqueur,
Ils combattent pour l'honneur.
L'Anglais, qui les admire, En vain voudrait les prendre
La mer les roulera parmi ses durs galets.
Ils ne veulent rien entendre
Et plutôt que de se rendre
A la face des Anglais
Crachent leurs derniers boulets.
Brutal est le canon, hélas ! Les flots sont traîtres.
Troués, brisé, haché, Sombra le lourd vaisseau.
Matelots, gabiers et maîtres
Surpassèrent les ancêtres
Avec eux, au fond de l'eau,
Descendit leur cher drapeau.
Vous tous, marins français, Lurons nés sur nos plages,
Leur sang bat dans vos coeurs, Vous êtes bien leurs fils,
Vous quittez nos doux rivages
Pour combattre des sauvages
Et tout comme au temps jadis
Un de vous en nargue dix !